Marché de la transaction de pharmacies en Bretagne : Devenez pharmacien entrepreneur !


2025 : vers une financiarisation des officines de pharmacie


Le modèle des pharmacies françaises, historiquement fondé sur l’indépendance du titulaire et la proximité sanitaire, traverse une profonde mutation. Depuis plusieurs années, le secteur officinal subit une érosion de ses marges liée à la baisse continue des prix de remboursement des médicaments, à la hausse des charges fixes et à la digitalisation rapide des services de santé. Dans le même temps, les départs massifs à la retraite des titulaires, conjugués à des coûts d’installation dépassant souvent le million d’euros, rendent difficile la reprise des officines par les jeunes diplômés. Ces fragilités structurelles ouvrent la voie à une transformation du capital des pharmacies, de plus en plus marquée par la logique d’investissement financier.

Cette financiarisation prend plusieurs formes. Les fonds d’investissement et les structures de capital-développement (LBO, private equity, dette privée) s’intéressent désormais à un secteur jugé résilient, peu sensible aux cycles économiques et disposant d’un flux de trésorerie stable. La loi de 2011, qui a autorisé les investisseurs non-pharmaciens à détenir des participations minoritaires via des sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL), a ouvert la voie à ces nouveaux entrants. Les groupements de pharmacies Pharmabest, Lafayette, ou Aprium — jouent un rôle central dans cette transformation : ils permettent la mutualisation des achats, la rationalisation logistique et la mise en place d’outils de gestion performants. Dans plusieurs cas, ils s’appuient sur des fonds de capital-investissement pour financer leur développement, comme le montrent les participations de Five Arrows Principal Investments ou UI Investissement.

L’objectif de ces opérations de LBO (Leveraged Buy-Out) est clair : financer le rachat d’officines ou de réseaux à crédit, en utilisant la rentabilité future pour rembourser la dette. Ce modèle, courant dans l’industrie ou la distribution, se diffuse désormais dans la santé, où il permet une croissance rapide par acquisitions successives (build-up). Il contribue à la constitution de véritables mini-chaînes d’officines, homogénéisées sous une enseigne commune, avec des pratiques de gestion et de marketing inspirées du commerce de détail. Ce mouvement s’accompagne d’une recherche d’efficacité économique : meilleure rotation des stocks, rationalisation du personnel, extension de la surface commerciale et mise en avant de la parapharmacie et des produits à marge élevée.

Cependant, cette logique financière n’est pas sans risques. L’endettement élevé des structures issues de LBO les rend plus vulnérables aux variations de taux d’intérêt ou à une baisse d’activité. La recherche de rendement peut aussi conduire à une priorisation des ventes non remboursées, au détriment du rôle sanitaire central du pharmacien. Plusieurs acteurs, dont l’Ordre national des pharmaciens et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), alertent sur le risque d’une « marchandisation » du médicament et sur la dilution du lien de confiance entre pharmacien et patient. La tension entre logique de rentabilité et mission de santé publique devient ainsi l’un des enjeux majeurs du secteur.

Dans d’autres pays européens, la financiarisation du réseau officinal est déjà bien avancée. Au Royaume-Uni, la libéralisation totale a permis la constitution de grands réseaux comme Boots ou Lloyds Pharmacy, dominés par des capitaux financiers. Si cette concentration a permis des gains de productivité, elle s’est traduite par une standardisation du service et une baisse du nombre d’officines de proximité. À l’inverse, l’Allemagne maintient une stricte interdiction des chaînes, imposant qu’un pharmacien ne puisse posséder qu’une seule officine — un modèle plus protecteur, mais moins dynamique économiquement. La France se situe entre ces deux extrêmes : elle connaît depuis 2015 une accélération des regroupements capitalistiques, sans pour autant abolir le principe de responsabilité individuelle du pharmacien titulaire.

À horizon 2030, Nous pouvons anticiper une transformation en profondeur du paysage officinal. Le capital des pharmacies devrait se structurer autour de holdings et de fonds régionaux, avec une diversification croissante des modes de financement (private equity, dette mezzanine, refinancement bancaire). Le rôle du pharmacien évoluera vers celui d’un manager-gestionnaire, davantage impliqué dans la performance économique de son entreprise que dans la seule dispensation. En parallèle, la digitalisation — téléconsultations, ordonnances électroniques, ventes en ligne — modifiera la relation au patient et l’équilibre économique entre officines physiques et plateformes numériques. Ces changements nécessiteront un encadrement réglementaire strict pour préserver la qualité du maillage territorial et l’indépendance du professionnel.

Cette mutation soulève également une question éthique : jusqu’où peut-on considérer la santé comme un actif financier ? Le modèle français repose historiquement sur l’idée que le pharmacien est avant tout un professionnel de santé au service du public, et non un commerçant soumis aux impératifs de rendement. Si la modernisation du secteur est nécessaire pour sa survie, sa financiarisation excessive pourrait en altérer la vocation première.


La Bretagne : terre de pharmaciens entrepreneurs !


La Bretagne possède un maillage territorial présentant de nombreux atouts malgré les défis d’optimisation à venir :

1. Effectifs et répartition des pharmaciens

  • 1 297 pharmaciens inscrits en activité en Bretagne.
  • 1 015 officines réparties sur la région.
  • 61 % de femmes et 39 % d’hommes parmi les titulaires.
  • Âge moyen des titulaires : 50,1 ans.
  • 18 % de pharmaciens titulaires ont moins de 40 ans.

Répartition des pharmaciens de 40 ans et plus par département :

  • Côtes-d’Armor (22) : 37 pharmaciens
  • Finistère (29) : 54 pharmaciens
  • Ille-et-Vilaine (35) : 67 pharmaciens
  • Morbihan (56) : 61 pharmaciens

2. Statut juridique des officines

  • 63,9 % des pharmacies sont exploitées en SEL (Société d’Exercice Libéral).
  • 19,5 % sont en SARL (Société à Responsabilité Limitée).

3. Pharmaciens adjoints

  • 1 296 adjoints en exercice.
  • 81,9 % de femmes et 18,1 % d’hommes.
  • Âge moyen des adjoints : 44,9 ans.
  • Moyenne : 1,3 adjoint par officine.

4. Densité et évolution du nombre d’officines

  • 30 officines pour 100 000 habitants en Bretagne, contre 31 officines en moyenne nationale.

Évolution du nombre de fermetures d’officines :

  • 2018 : 16 fermetures
  • 2019 : 11 fermetures
  • 2020 : 11 fermetures
  • 2021 : 9 fermetures

La Bretagne présente une profession de pharmacien marquée par une forte proportion de femmes, notamment chez les adjoints. Les formes juridiques évoluent vers des structures plus modernes comme les SEL. On observe une légère érosion du nombre d’officines, bien que la Bretagne conserve une densité proche de la moyenne nationale.

Le vieillissement de la profession (âge moyen de 50 ans pour les titulaires) pourrait poser un défi de renouvellement dans les années à venir, surtout dans certains départements plus touchés par cette tendance.

Enjeux futurs : renouvellement des titulaires, attractivité du métier pour les jeunes générations et stabilité du maillage territorial des pharmacies !


Reprendre un officine en Bretagne


Lors de l’acquisition d’une pharmacie d’officine, les pharmaciens disposent de plusieurs ressources de financement : apport personnel, financement bancaire, financement du stock (crédit vendeur) et diverses aides à l’installation. En général, l’apport personnel représente environ 18 % du prix d’achat, tandis que le financement bancaire s’étend sur une durée de 12 ans. Les aides à l’installation jouent également un rôle crucial dans la facilitation de l’acquisition et la pérennisation de l’officine.

Structure et propriété de l’officine

Le pharmacien doit être inscrit en section A, et peut investir via une société (SEL ou SPFPL) à condition d’exercer dans une officine. Il est important que le pharmacien titulaire ou sa holding détienne la majorité du capital de l’officine. Pour encadrer une association, il est conseillé de rédiger un « Pacte d’associés » et un « Règlement intérieur » avec l’aide d’un expert-comptable, avocat ou notaire spécialisé. L’objectif à terme est que le titulaire devienne autonome financièrement en possédant la totalité du capital.

Durée et modalités de l’association

La durée de l’association est généralement fixée entre 5 et 8 ans. Il est essentiel de déterminer les modalités financières de sortie à l’avance, intégrant une résolution annuelle lors de l’Assemblée Générale Ordinaire (AGO) pour évaluer la valeur de l’officine, ainsi que des clauses de préemption et d’agrément en cas de cession. Le titulaire doit surmonter la difficulté de payer son travail tout en démontrant la rentabilité de l’investissement à l’investisseur.

Boosters d’apport des groupements ou grossistes

Certains groupements de pharmaciens ou grossistes répartiteurs proposent des « boosters d’apport » pour assurer la pérennité de leur réseau et attirer de nouveaux adhérents. Ces boosters, d’une durée de 5 à 15 ans, prennent différentes formes : prêts classiques, participatifs, in fine, avec différés d’amortissement, obligations simples (O.S.) ou obligations convertibles en actions (O.C.A.). Ces derniers peuvent se transformer en actions, changeant le prêteur en associé, bien que la législation actuelle limite l’accès au capital des officines aux seuls pharmaciens.

Montants et garanties des boosters

Le montant du prêt accordé est souvent le double ou le triple de l’apport du pharmacien ou de l’investisseur. Il peut être octroyé à la pharmacie, à la holding du pharmacien ou au pharmacien titulaire à titre personnel. Les boosters d’apport non pharmaciens prennent souvent la forme d’O.S. ou d’O.C.A. avec un intérêt annuel, misant sur une évolution législative future ou une prime de non-conversion (P.N.C.).

Solutions de boosters d’apport par d’autres organismes financiers

Des organismes financiers, comme Interfimo (Propuls’IF), offrent des solutions de « boosters d’apport » avec un différé de remboursement, réservées aux pharmaciens à titre personnel. Par exemple, l’emprunt obligataire simple de la CAVP, financé par le fonds InterPharmaciens, permet de tripler l’apport initial jusqu’à 500 000 euros, avec un prêt sans garantie d’une durée de 15 ans et une franchise de capital de 12 ans à un taux d’intérêt de 4,50 %. Cependant, ce type de financement comporte des contraintes, notamment en matière de distribution de dividendes et de blocage des comptes courants d’associés.

Avantages et inconvénients des boosters d’apport

Avantages :

  1. Réduction des coûts bancaires : Les boosters s’appuient sur des signatures solvables, réduisant ainsi les coûts proposés par les banques partenaires.
  2. Augmentation de la marge de manœuvre financière : Grâce au différé d’amortissement du capital, ils augmentent la marge de manœuvre financière pendant les premières années d’exploitation.
  3. Amélioration du taux de rentabilité interne : Les différés de remboursement augmentent la rentabilité interne en allégeant les charges financières initiales.
  4. Facilité d’accès au financement : Certains boosters permettent une amélioration apparente de l’endettement ou de l’apport, facilitant l’accès au financement.

Inconvénients :

  1. Contraintes juridiques et contractuelles : Selon les cas, les boosters peuvent comporter des contraintes liées à la structure juridique (SAS/Obligataire) ou nécessiter la signature de contrats spécifiques (adhésion à un groupement, choix des établissements bancaires).
  2. Taux élevés et contre-garanties : Les taux d’intérêt peuvent être élevés et certaines formules exigent des contre-garanties et des frais de dossier.
  3. Diminution de la capitalisation lors de la revente : En différant les remboursements d’emprunts, la capitalisation du pharmacien diminue au moment de la revente.
  4. Inflation des prix de cession : Les montages financiers de plus de 12 ans peuvent entraîner une inflation des prix de cession.
  5. Contournement de la législation : Certains montages financiers (OS/OCA/BSA) peuvent contourner la législation pharmaceutique.

L’acquisition d’une pharmacie d’officine implique divers moyens de financement et aides à l’installation, chacun avec ses avantages et inconvénients (lire notre article sur l’anticipation et la préparation à la reprise d’une officine). Il est crucial pour les pharmaciens de bien comprendre les implications de chaque option, de planifier soigneusement leur association et de choisir les solutions de financement qui correspondent le mieux à leur situation et à leurs objectifs à long terme. La préparation et l’accompagnement par des professionnels spécialisés sont essentiels pour naviguer dans ce processus complexe et garantir la réussite de l’installation.